LE LIEU JAUNE
(Pallachius pallachius)
Le lieu jaune - Pollachius pollachius - est un poisson de mer de la famille des Gadidae. Il existe une espèce voisine, le lieu noir - Pollachius virens -, qui s'en différencie par sa ligne latérale plus foncée et courbée au niveau des nageoires pectorales. Son nom lui viendrait de son nom usuel en breton de Levneg et son qualificatif de la teinte dorée jaunâtre de ses flancs, camouflage indispensable dans les habitats rocheux ou peuples de laminaires qu’il fréquente.
Description
Le lieu jaune peut atteindre 1,3 m de long. Son corps est allongé, fusiforme, légèrement comprimé latéralement et recouvert de petites écailles.
Il possède trois nageoires dorsales et deux nageoires anales.
Sa mâchoire inférieure est plus grande que sa mâchoire supérieure, les deux munies de petites dents.
Le corps est parcouru par une ligne latérale et bien visible : elle est incurvée au-dessus des pectorales. Sa couleur varie du vert olive au brun sur le dos, avec des flancs plus clairs souvent jaunâtres ou dorés, et un ventre blanc argenté. Les jeunes poissons ont souvent des marbrures sombres sur les flancs.
Écologie
Le lieu jaune vit entre 1 m et 100 m de profondeur parfois à des profondeurs allant jusqu’à 200 m près des rochers, des récifs et des tombants, le long du littoral étant jeune, il s'en éloigne à l'âge adulte. Le lieu jaune se rapproche des côtes au printemps et à l'automne. Il affectionne tout particulièrement les fonds de laminaires. Il est présent principalement dans les eaux tempérées de l'Atlantique Nord-Est, des côtes de la Norvège et des îles Britanniques jusqu'aux côtes de l'Espagne et du Portugal ainsi que de l’Islande et des iles Féroé mais plus rarement aussi en Méditerranée et dans l’Ouest de la Baltique. Les plus fortes concentrations de cette espèce se trouvent en Manche Ouest, en mer Celtique et dans le golfe de Gascogne.
Jusqu'à deux ans, près des côtes, il se nourrit de plancton puis au gré de sa vie pélagique, il mange des petits poissons comme le sprat, le hareng ou le tacaud ainsi que des petits crustacés, crevettes, céphalopodes ou des mollusques. En tant que prédateur, le lieu jaune joue ainsi un rôle crucial dans la régulation des populations de petits poissons et d'invertébrés marins.
Il est souvent solitaire, mais peut former de petits groupes, surtout lorsqu'il chasse. La période de frai du lieu jaune se situe généralement entre janvier et juin, selon la région. Les femelles pondent de nombreux œufs pélagiques (flottants), qui éclosent après environ une semaine. Les larves dérivent avec le plancton avant de devenir des juvéniles et de s'installer sur des fonds plus rocheux.
Le lieu jaune et l’homme
Le lieu jaune est un poisson marin apprécié tant pour la pêche sportive que pour sa consommation et qui entretient avec l'homme une relation ancienne. Ses stocks halieutiques semblent connaître des variations plus ou moins naturelles (la pollution, la surpêche, le réchauffement climatique pouvant au moins en partie expliquer ces variations).
Sa chair est délicieuse. La chair du lieu jaune est blanche, ferme et délicate, ce qui en fait un poisson apprécié dans la cuisine. Il est souvent comparé à la morue et peut être utilisé de manière interchangeable dans de nombreuses recettes. Les modes de préparation populaires incluent le grillage, le pochage, la cuisson en papillote et l'utilisation dans des plats traditionnels comme la brandade. Sa saveur subtile et sa texture permettent une grande variété de préparations culinaires. Le lieu jaune est un poisson très pauvre en calories, mais riche en protéines avec 16 g pour 100 g. Il constitue une bonne source d'omégas 3, bénéfiques pour la santé du cœur et du cerveau. Il est aussi source de vitamines B et D et de phosphore.
Le lieu jaune est exploité uniquement par la flotte des différents pays d'Europe. Les techniques de pêche incluent la pêche à la ligne, le chalut et le filet maillant. La Norvège est le principal pays pêcheur de lieu jaune au niveau mondial ; ses débarquements provenant aujourd’hui quasi exclusivement de la mer du Nord où cette espèce est pêchée principalement au chalut de fond. Quand à elles, les captures françaises proviennent du golfe de Gascogne et est principalement pêchée par les ligneurs et les fileyeurs. La situation est catastrophique pour les ligneurs de la pointe Bretagne dont la technique de pêche, qui ne génère pas de problèmes pour l'environnement, est donc à encourager. Malheureusement, comme pour le bar, ce sont des produits de luxe qui ne résolvent pas la question de l'apport de protéines pour l'ensemble de la population.
Le lieu jaune fait partie des espèces les plus ciblées par la pêche récréative sur la côte Atlantique, prisée des pêcheurs sportifs pour sa combativité et sa vivacité lorsqu'il est pêché à la ligne. Les plaisanciers n'ont droit actuellement qu'à deux prises par jour et par pêcheur.
Les plus beaux spécimens sont souvent trouvés dans les épaves et les roches isolées a plus de 30 mètres de profondeur.
La pêche du lieu jaune contribue de manière significative aux revenus des pêcheurs et des habitants des côtes. La pêche sportive du lieu jaune contribue également au tourisme dans les régions côtières, attirant des amateurs de pêche de divers horizons.
Depuis que l’espèce et en particulier ses besoins alimentaires sont mieux connus, elle fait l’objet d’un intérêt croissant pour la pisciculture en zone tempérée fraîche.
Pour une pêche durable du lieu jaune
La surpêche et les changements environnementaux peuvent affecter les populations de lieu jaune. Il est donc essentiel de mettre en place des mesures de gestion durable pour assurer la pérennité de l'espèce.
En premier lieu, la préservation de ses habitats, tels que les fonds rocheux et les récifs, est essentielle.
En second, les quotas de pêche, les restrictions de taille et de saison, ainsi que les zones protégées sont des outils de gestion couramment utilisés pour réguler la pêche du lieu jaune et protéger ses habitats. La maille du lieu jaune, c'est-à-dire la taille légale de capture pour les pêcheurs de loisir et les professionnels est de 30 cm en Manche, en Atlantique et en mer du Nord, et elle reste à fixer en Méditerranée. A noter que la maille biologique — taille à laquelle 100 % des lieus jaunes se sont reproduits — est d'environ 60 cm. Des plans de gestion existent pour le lieu jaune des stocks suivants :
- Mer Celtique, Manche, Ouest Écosse : ce stock est inclus dans le « plan de gestion pluriannuel pour la pêche en eaux occidentales et les eaux adjacentes », approuvé par l’UE en 2019. Aucun plan de gestion commun entre l'UE et le Royaume-Uni n'existe pour ce stock partagé.
- Mer du Nord, Skagerrak et Kattegat : le « plan de gestion pluriannuel pour les stocks de la mer du Nord et les eaux adjacentes » s'applique également aux prises accessoires de lieu jaune capturées dans les zones couvertes par ce plan. Des réglementations existent pour la taille minimum des maillages à utiliser pour la pêche ciblée du lieu jaune dans certaines zones de l'Atlantique Nord Est : 110 mm et 80 mm selon un zonage de terrain.
- Si l'état de certaines populations de poissons le nécessite, l'arrêt de leur pêche ciblée doit s'appliquer à tous, professionnels comme récréatifs.
- S’en tenir aux données récentes comme la publication par le Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM) fin juin 2024 d’une série d’avis sur des stocks d’espèces intéressant les pêches françaises (Cf. Lieu jaune en zones VI et VII).
Enfin, les programmes de sensibilisation et d'éducation sont importants pour informer le public et les pêcheurs sur l'importance de la conservation du lieu jaune. Ces initiatives encouragent des pratiques de pêche responsables et une consommation durable des ressources marines. On recommande ainsi de ne consommer que les poissons ayant une taille > à 60 cm, ou les grandes darnes/filets issus d’individus matures ayant eu le temps de se reproduire et si possible de privilégier les individus pêchés à la ligne.