LE MERLU
(Merluccius merluccius)
Le merlu commun - Merluccius merluccius - est un poisson de mer de la famille des Merlucciidae. Son nom viendrait de sa dénomination provençale de Merluche, il est aussi appelé colin, colinot ou encore merluchon quand il est de petite taille. Il existe bien d’autres espèces de merlus présentes aux quatre coins des mers du globe qui sont également commercialisées congelées en France, comme le merlu du Cap - Merluccius capensis -, le merlu de Nouvelle Zélande - Merluccius australis-, Merluccius hubbsi ou merlu d’Argentine et enfin le merlu du Chili – Merluccius gayi. Moins commercialisé chez nous, citons enfin Merluccius productus venant des côtes californiennes.
Description
Le merlu a un corps allongé et fuselé, avec une tête relativement grande. Sa peau est de couleur argentée sur les flancs, plus sombre, brunâtre ou de couleur ardoise sur le dos. Il est pourvu de deux grandes nageoires dorsales et d'une nageoire anale.
Le merlu peut atteindre 1 m de long sachant que la plupart des poissons pêchés mesurent entre 50 et 80 cm. Son poids varie mais peut atteindre 5 kg voire plus.
Il possède une large bouche dotée de dents pointues lui permettant de capturer efficacement petits poissons et crustacés dont il se nourrit.
Ses écailles sont petites et de forme cycloïde.
Le merlu peut vivre une vingtaine d’années.
Écologie
Le merlu se trouve généralement dans les eaux profondes tempérées de l’Atlantique, d'Europe, d'Amérique du Nord et de la Méditerranée ainsi qu’en Mer Noire, préférant les zones de substrats marins vaseux, sableux ou boueux où il se cache des prédateurs. Il vit entre 200 et 800 m mais peut se trouver à des profondeurs de 1 000 m.
Le merlu joue un rôle essentiel dans la chaine alimentaire marine en tant que poisson carnivore, chassant la nuit et se nourrissant de petits poissons - sardines, harengs, anchois…-, calamars et crustacés et régulant ainsi ces espèces. À son tour, le merlu est une proie pour certains poissons comme le thon et les mammifères marins tels les marsouins.
Comme beaucoup d’espèces marines, le merlu est affecté par le changement climatique modifiant les températures de l’eau et les habitats, influençant sa reproduction - une température comprise entre 10 °C et 13 °C est nécessaire à cette dernière - et sa distribution.
Le merlu se déplace en bancs, notamment pendant la période de reproduction au printemps ou en été. Ce poisson atteint sa maturité sexuelle vers 3-4 ans, se reproduit en haute mer et possède une fécondité élevée. Les femelles pondent des ovules flottants et les larves émergeantes sont pélagiques, vivant en surface avant de migrer vers des eaux de plus en plus profondes au fur et à mesure qu’elles grandissent.
Les merlus effectuent deux types de migrations :
- Une migration quotidienne : consistant à aller vers les eaux superficielles pendant la nuit pour chasser des proies elles-mêmes en recherche du plancton et vers les profondeurs pendant la journée en descendant la colonne d’eau jusqu’au fond boueux, où ils attendent la nuit, protégés par l’obscurité.
- Une migration annuelle : les femelles et les mâles adultes migrent au début du printemps vers des eaux plus froides pour frayer. À cette période, les organes reproducteurs sont si développés qu’ils font pression sur l’appareil digestif et l’animal cesse de se nourrir. Quand ils atteignent les eaux froides depuis les eaux plus chaudes, les femelles et les mâles libèrent leurs gamètes qui vont féconder en pleine eau.
Le merlu et l’homme
Le merlu fait partie intégrante des cultures et traditions marines des côtes où il est pêché, avec des fêtes du merlu comme au pays basque.
La chair du merlu est très digeste et d’une grande qualité nutritionnelle avec un faible taux de graisse, peu de cholestérol et peu d’acides gras saturés. Il est très apprécié pour sa chair délicate et savoureuse, très prisée dans de nombreuses gastronomies, notamment méditerranéennes et cuisiné de diverses manières à travers d’innombrables recettes : poêlé, grillé, en papillote, frit, en soupe, entier comme en filets ou en darnes, etc. - avec la célèbre présentation dite en colère donnée au poisson qui se mord la queue -. En Espagne, on consomme les œufs de merlus servis en médaillon avec une huile piquante.
Au Moyen-Âge, du fait de sa grande bouche et de son régime carnassier, on l’avait dénommé le brochet de la mer. Selon une croyance du XVIIe siècle, la tête du merlu contiendrait deux pierres (concrétions) qui, quand le poisson a été pris à la pleine lune, guérissent la fièvre si on les porte autour du cou, enveloppées dans un linge.
Les joueurs de l’équipe de football de Lorient sont surnommés les Merlus.
Pour une pêche durable du merlu
Le merlu est l'un des poissons les plus pêchés en Europe. Il est capturé au chalut, au filet, au filet maillant ou à la palangre par des pêcheurs professionnels comme amateurs. La surpêche est un problème majeur pour les populations de merlu ; la surpêche massive dont il a été victime à la fin du XXe siècle a amené l'espèce au bord de l'extinction. La principale cause identifiée du déclin des populations était les captures très importantes de tout petits merlus, donc d’une proportion trop conséquente de poissons qui ne s’étaient pas encore reproduits (80% des captures), cumulée au développement d’une pêcherie au large dirigée sur les adultes reproducteurs (au filet et à la ligne).
Des efforts sont en cours afin de promouvoir des pratiques de pêche plus durables, préservant à la fois les stocks de merlus et l’écosystème où il vit, avec la mise en place d’un réseau de zones de protection forte qui trouverait tout son sens. Cela induit des règlementations sur les tailles minimales de capture et des quotas de pêche qui diffèrent selon les zones de pêche s’efforçant de suivre les avis scientifiques sur l’état des stocks dressé par le Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM). L’évaluation du stock nord est établie à partir d’un modèle structuré en taille et repose sur deux types de données : les données de captures commerciales et les indices d’abondance obtenus à partir de 4 campagnes scientifiques. Le diagnostic actuel fait état d’une bonne situation du stock Nord en raison d’une forte augmentation de la biomasse féconde ces dernières années (300 000 tonnes en 2015) liée à l’arrivée en nombre de juvéniles en 2008, désormais adultes et exploités, et d’une diminution de la mortalité par pêche. Des plans de gestion existent en Atlantique Nord (mais la Norvège et le Royaume-Uni ne les ont pas ratifiés) ainsi qu’en Méditerranée mais en secteur occidental uniquement.
Les voies d’amélioration ont porté sur une meilleure sélectivité des chaluts avec un maillage plus large des filets (100 mm au lieu de 70 mm) et une série d’innovations sur les engins (panneaux à maille carrées par exemple). Les TAC (Totaux Admissibles de Captures) ont également été divisés par deux par les instances politiques européennes et nationales. Au fil du temps, des limitations de l’effort de pêche ont été instaurées et l’utilisation de filets interdite au-delà de 200 mètres de profondeur au large des îles britanniques et irlandaises.
La situation des effectifs de merlus est ainsi moins problématique en Atlantique et s’est nettement améliorée en mer Adriatique. En effet, en mer Adriatique a été créée en 2027 par les autorités italiennes et croates une FRA (Fisherie restrict area – zone de pêche restreinte) interdisant la pêche de fond et instaurant une zone tampon où la pêche du merlu était réduite de moitié. Des efforts à court terme des pêcheurs ayant abouti à des résultats plus que probants obtenus en seulement 18 mois. La biomasse du merlu s’y est multipliée par 2,5. Un exemple à suivre pour le golfe du Lion sur les côtes françaises et espagnoles méditerranéennes.
Les effectifs des espèces peuvent se reconstituer, s'ils sont soutenus par des mesures de biologie de la conservation appropriées et comprises. Encore faut-il qu'ils n’aient pas atteint un point de bascule induisant un non-retour possible. En revanche, la situation est toujours très inquiétante et moins suivie en Méditerranée orientale et en Mer Noire.