Les vipères (Viperinae)

Publié le 28/03/2024

Serpents venimeux au charme envoûtant, les vipères sont des reptiles qui fascinent les naturalistes du monde entier ! On comptabilise quatre espèces de vipères en France métropolitaine : la vipère aspic (Vipera aspis) et la vipère péliade (Vipera berus) pour les plus communes, ainsi que la vipère de Séoane (Vipera seoanei) et la vipère d’Orsini (Vipera ursinii) qui elle, est une toute petite vipère que l’on trouve dans les Alpes. Découvrez dans ce Zoom espèce du mois ces serpents essentiels au bon équilibre de nos milieux naturels.

Description

Les vipères font partie d’une grande famille de serpents, celle des Viperidés (Viperidae), qui comprend les crotales, les azémiopes et les vipères, qui sont des sous-familles.

Comme tous les vipéridés, leurs pupilles sont verticales. Leurs écailles sont très robustes et possèdent des carènes : c’est une ligne saillante qui va diviser une écaille en deux pour lui donner du volume. On peut également les reconnaître grâce à leur denture, qui peut infliger une morsure venimeuse.

Plutôt trapues, les vipères ne sont pas de très gros serpents : elles ne pèsent que quelques grammes et les grands individus peuvent aller jusqu’à 90 cm de longueur, mais en moyenne elles mesurent 60 cm.

Le motif de leur tête triangulaire est unique pour chaque individu, mais avec une forme céphalique, c'est-à-dire que l'on y retrouve toujours la forme d’un V. Certains individus que l’on trouve en haute altitude sont cependant mélaniques, c’est-à-dire entièrement noirs, pour mieux capter la chaleur.

Les vipères possèdent une langue bifide qui leur sert de récepteur : les particules odorantes captées par la langue sont transmises à l’organe de Jacobson qui va les analyser.

Le corps est composé d’une tête, d’un tronc et d’une queue très courte qui commence après le cloaque, un orifice qui, comme chez les oiseaux, sert à la fois aux déjections et à la reproduction. Elles muent plusieurs fois durant leur vie, le terme scientifique de la phase de mue est d’ailleurs nommé l’ecdysis.

Pour les différencier des couleuvres, vous pouvez reconnaître la vipère à son rostre (le prolongement antérieur rigide surmontant la tête) prononcé. De plus, les couleuvres ont une pupille ronde, et leur queue est longue et fine.

Une vipère de Séoane - Crédits © Animalia

Ecologie

Elles sont les serpents qui ont l'aire de répartition naturelle la plus vaste au monde, partant de l’Europe de l’Ouest et allant jusqu’à l'extrêmité de la Sibérie, on en trouve jusqu’à l’île Sakhaline ! On en observe également plus au sud (sur toute la partie nord de l’Afrique, au Moyen-Orient et au nord de l’Asie). En somme, dans toute l’écozone* Paléarctique.

La vipère aspic fréquente des milieux variés et se nourrit de micromammifères. Elle est largement répandue en France métropolitaine, mais est absente au nord du pays. On peut la trouver jusqu’à 3 000 mètres d’altitude dans les Alpes.

La vipère de Séoane, elle, se rencontre uniquement dans le nord de la péninsule Ibérique, à l'extrême Sud-Ouest de la France, à la frontière franco-espagnole, et jusqu'à l'extrême Nord du Portugal. On peut la retrouver jusqu’à 1 900 mètres d’altitude !

Une vipère péliade, entre herbe et soleil.  Crédits © Nathan Horrenberger

La vipère péliade est largement plus répandue en Europe. On la retrouve dans toute l’Eurasie, à partir de la Bretagne, tout le nord de la France et de la Belgique. On en voit aussi en Auvergne, son territoire étant assez morcelé. Sa population a beaucoup régressé dans les régions cultivées d'Europe occidentale en raison de l'agriculture intensive.

Enfin, on ne trouve que rarement la vipère d’Orsini en France, dans l'extrême Sud-Est (Alpes-Maritimes et Alpes-de-Haute-Provence) jusqu’à 2 250 mètres d’altitude, et marginalement dans le Var et le Vaucluse.

Ces quatre espèces de vipères ont des habitats très variés. Il peut s'agir de pelouses calcicoles ou de landes sèches, mais aussi, contrairement à la croyance commune, de prairies plus humides et milieux humides de haute montagne. On les trouve également au bord des torrents ou des étangs.

Les femelles vipères se reproduisent avec plusieurs mâles et ont la capacité de conserver le sperme d'un accouplement pendant plusieurs mois ! Au moment opportun, elles pourront s’inséminer elles-mêmes. Les petits se nomment les vipéreaux, et se développent dans des œufs, que la femelle garde en elle (ovoviviparité).

Une vipère aspic à l'affût (Vipera aspis aspis). Crédits © Felix Reimann / Wikipedia Commons

Les vipères et l’Homme

Les serpents sont des animaux très symboliques pour les Hommes et victimes de superstitions. La vipère est en particulier un symbole de méchanceté et de cruauté, d’où l’expression « langue de vipère ».

Certains mythes incongrus circulent toujours, comme dans le canton de Fribourg et dans les Préalpes, certains croyant encore que les vipères tètent les vaches et que lorsque le ruminant ne donne plus de lait, c'est de la faute du reptile qui l’a tété.

On pense aussi aux légendes sur les Gorgones de la Grèce Antique, dont la plus connue n’est autre que Méduse. Sa chevelure est constituée d’un amas de vipères qui pétrifient toutes celles et ceux qui les regardent.

Malgré ces clichés péjoratifs, les scientifiques ont su démontrer les valeurs inestimables des vipères dans la chaîne du vivant. Concernant leur niveau de protection en France, elles sont toutes intégralement protégées. La vipère d’Orsini est classée comme espèce vulnérable par l’UICN, les trois autres espèces étant en statut de “préoccupation mineure” pour l’instant.

Méduse, la gorgone

Les vipères dans une Oasis Nature

Evidemment, les vipères doivent être approchées et observées avec attention compte tenu de leur venin, très dangereux pour l’Homme. Si votre Oasis Nature se situe dans une des aires de répartition géographique énoncées dans l’article plus haut, et qu’elle comporte un des habitats propices (points d’eau, pelouse sèche, hautes herbes, tas de pierre, lande, lisière de ronciers…), il est probable qu’une ou deux vipères aient élu domicile dans votre Oasis.

Étant des animaux calmes et peu farouches, elles sont souvent surprises et fuient donc au dernier moment. C’est pourquoi lorsque vous vous baladez sans faire attention, vous pouvez vous faire mordre ou les écraser par accident. Mais pas de panique ! Soyez attentif aux bruits qui indiqueraient leur présence : on peut les entendre en un bruissement souple continu et gracieux. Évitez aussi de tripoter les petits cailloux et branches tombés à terre en été et protégez-vous les chevilles lors de vos balades !

L'habitat de choix des vipères : un milieu ouvert prairial. Source : Wikimedias Commons

En cas de danger, elles se réfugient dans les massifs broussailleux. Elles ont besoin de se sentir protégées par un couvert végétal dense, mais restent à proximité de points d’eau et de milieux ouverts où elles peuvent prendre le soleil.

Avoir une vipère dans votre Oasis Nature régulera les populations de petits mammifères (campagnols, souris…) et évitera également la pullulation d'insectes. Le milieu n’en sera que plus sain et stable, grâce à son rôle de prédateur. Si vous appliquez les consignes préventives de sécurité énoncées auparavant, vous n’avez pas de souci à vous faire !

* Écozone : Dans certains systèmes de classification écologique des territoires biogéographiques terrestres, une écozone est définie comme étant une partie de la surface terrestre représentative d'une unité écologique à grande échelle

Crédit photo en-tête : © Ian Lindsay / Pixabay