Loi TRACE : nouvelle attaque du Sénat contre l'objectif ZAN
Publié le 27/01/2025
Une proposition de loi sénatoriale visant à remettre en cause l'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) sera discutée au Sénat les 18 et 19 février prochain. Si cette loi est adoptée, elle portera fortement atteinte à l'objectif de lutte contre l'artificialisation, première cause de perte de la biodiversité et d'augmentation du risque d'inondations .
Lutter contre l'artificialisation des sols, c'est lutter contre les pertes de fonctions productives des sols et de la biodiversité, mais c'est aussi lutter contre l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre, les risques de pollutions ou encore les risques d'inondations. On pourrait penser que tout à chacun peut comprendre l'importance de maintenir les objectifs et la définition fixés par la loi Climat et Résilience pour atteindre le ZAN à l'horizon de 2050. Ce n'est manifestement pas le cas de certains sénateurs qui ont déposé une proposition de loi.
Cette proposition de loi (PPL) dite « Trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux » (TRACE) vise à assouplir des mesures visant à réduire l'artificialisation des sols. Rappelons que le changement d'usage des sols, et donc la destruction et l'artificialisation des milieux, est la première cause de destruction de la biodiversité dans le monde. En France, l'artificialisation des sols s'élève à plus de 20 000 hectares par an (soit environ deux fois la taille de Paris) et ce chiffre ne baisse pas malgré l'adoption de l'objectif ZAN en 2021.
L'objectif ZAN, tel que défini dans la loi climat et résilience de 2021, se divise en deux objectifs distincts. Diviser par deux la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestier (ENAF) entre 2021 et 2031 par rapport à la décennie précédente et l'atteinte du ZAN d'ici 2050, c'est-à-dire autant ou plus de surfaces « renaturées » que de surfaces artificialisées.
Tout d'abord, la proposition de loi TRACE tente de redéfinir la notion d'artificialisation pour la limiter à la notion d'imperméabilisation. Depuis la loi Climat et Résilience de 2021, l'artificialisation est définie comme « l'altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d'un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ». La PPL propose de la définir comme simple consommation d'Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers (ENAF), la consommation d'ENAF étant elle-même définie comme « la création ou l'extension effective d'espaces urbanisés ». Ce changement de paradigme ne permet pas d'apprécier l'ensemble des enjeux liés à l'artificialisation et pourrait notamment venir faciliter la bétonisation d'espace vert en zone urbaine, pourtant nécessaire aux biens êtres et au développement de la biodiversité en ville.
La PPL du Sénat viendrait également supprimer le premier objectif du ZAN en permettant de déterminer la consommation d'ENAF autorisée à partir des besoins énoncés par les élus locaux. Cela revient à remettre en cause la limitation de l'artificialisation, sans encourager à la sobriété foncière. Rappelons que la loi ZAN de juillet 2023 permet déjà la prise en compte des spécificités locales dans les différents documents de planification.
Pour Humanité et Biodiversité, l'objectif de réduction de moitié de la consommation d'ENAF d'ici à 2031 doit être maintenu car il est nécessaire à l'atteinte du ZAN d'ici à 2050. Il permet d'engager une véritable transition pour permettre une courbe de l'artificialisation comme ci-dessous :
Évolution de l’artificialisation des sols nettes selon l’objectif de la loi Climat et Résilience
Pour Humanité et Biodiversité, il est urgent d'engager un nouveau modèle d'aménagement des territoires pour qu'ils soient plus accueillants pour le vivant et plus résilients face aux effets du changement climatique. Ce changement de modèle pourra permettre une meilleure planification du territoire et rationaliser l'aménagement dans une approche de sobriété foncière. Cela doit permettre aux élus de s'interroger sur les véritables besoins de leur territoire, d'étudier les possibilités de rénovation et de réhabilitation d'espaces artificialisés, de chercher et adopter les solutions les moins impactantes pour l'environnement.
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