Position d'H&B - Dermatose nodulaire des bovins
Publié le 28/07/2025
La récente annonce d'un début d'épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) sur les troupeaux de vaches laitières en Haute-Savoie a suscité de vives émotions et de nombreuses interrogations à juste titre sur le bien-fondé des mesures d’abattage total des troupeaux dans lequel des cas de cette maladie étaient détectés. Sans prétendre à une expertise scientifique, Humanité et Biodiversité a consulté plusieurs spécialistes afin de comprendre les enjeux sanitaires et épidémiologiques de cette crise.
Notre association ne peut revendiquer une expertise lui permettant de s’exprimer publiquement sur ce sujet mais, après consultation de plusieurs experts, je tiens à vous informer de quelques éléments essentiels qui, au moins à court terme, justifient à mon avis, hélas, cette mesure d’abattage total, au moins à court terme, du fait des risques élevés de transmission.
1. Je rappelle tout d’abord qu’il s’agit d’une maladie virale connue dans des pays tropicaux et transmise d’un animal à l’autre par des insectes piqueurs. Cette infection peut conduire à la mort des animaux. La transmission par contact physique entre animaux malades ou contaminés (mais n’ayant pas encore manifesté la maladie) et animaux sains n’est pas exclue comme une autre voie de transmission. Notre pays était identifié par les experts comme un pays pouvant, du fait du réchauffement climatique mais aussi des transports internationaux d’animaux vivants, être atteint et les stratégies de lutte avaient été définies au niveau européen.
2. En ce qui concerne les espèces concernées, la transmission à l’homme est exclue dans l’état actuel de la science (c’est-à-dire qu’il n’existe aucune donnée scientifique montrant une telle transmission). Les produits alimentaires (notamment le fameux reblochon) ne sont donc pas concernés. Par contre, la transmission à des espèces sauvages proches des bovins (bouquetins, mouflons…) est mal documentée (on en connait qu’un cas de transmission sur un Oryx en Arabie) mais ne peut être exclue.
3. La détection des animaux porteurs en phase d’incubation (avant la manifestation des signes cliniques comme une fièvre, des boutons) apparaît difficile car la présence du virus dans le sang est intermittente : un animal infecté peut répondre négativement au test de dépistage tout en pouvant transmettre la maladie. Il apparaît donc inévitable d’abattre l’ensemble des troupeaux dans lesquels des animaux malades sont détectés et, en outre, de mettre en place un périmètre de sécurité pour éviter toute circulation d’animaux entre les zones infectées et les zones indemnes.
4. L’émergence de cette maladie en Europe avait été anticipée et des banques de vaccins avaient été mises en place. Des équipes de vaccination sont déjà à l’œuvre mais il faut une vingtaine de jours pour que l’immunité se développe et que les animaux vaccinés soient donc protégés. Au cours de cette période, il faudra donc continuer à recourir à l’abattage des troupeaux où la maladie se développerait.
5. L’éradication des insectes vecteurs par des insecticides apparait également à la fois irréaliste, du fait de la diversité des vecteurs et du milieu ouvert où évoluent les bovins, et dangereuse pour la biodiversité (en particulier pour les insectes non cibles) voire pour les humains (voir le débat actuel sur les insecticides).
6. On ne peut que souhaiter le développement de méthodes alternatives à l’abattage des troupeaux, pratiqué à plusieurs reprises au cours des dernières années (vache folle, fièvre aphteuse) et également à l’abattage systématique d’animaux sauvages susceptibles d’être porteurs (cas récent des bouquetins du massif du Bargy). Nous invitons donc à renforcer les recherches dans ce domaine.
Enfin, il va de soi que notre association est solidaire des agriculteurs touchés par ces mesures, économiquement mais aussi psychologiquement, et défendra leur indemnisation et le soutien à la reconstitution de leur cheptel.
Bernard Chevassus-au-Louis, Président de l'association Humanité et Biodiversité
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