Épandage pesticides : décret sur les distances de sécurité
Que penser du projet de décret sur les distances de sécurité dans l'épandage des pesticides ? Début septembre, le gouvernement annonçait les distances minimales entre zones d’épandage et zones d’habitation, à savoir cinq mètres pour les cultures basses, dix pour les cultures hautes et les substances dangereuses.
Une consultation a été mise en ligne lundi 9 septembre pour demander l’avis des citoyens sur ces projet d’arrêté et projet de décret relatifs à « la protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d’habitation ».
La proposition du Ministère de la transition écologique et solidaire s’appuie sur un avis de l’Anses, l’agence nationale de sécurité sanitaire, publié le 14 juin 2019.
Que penser des distances de sécurité énoncées par le gouvernement ? Voici notre position :
1. Il convient tout d’abord de rappeler que, par essence, les produits phytosanitaires, qu’ils soient « naturels » ou de synthèse, sont pour la plupart(1) des biocides, et donc, que, indépendamment de leurs impacts sur la santé humaine, ils ont, directement ou indirectement(2), un fort impact sur la biodiversité.
À ce titre, l’objectif de restreindre leur usage, ainsi que celui des autres biocides pouvant être disséminés dans l’environnement (certains médicaments vétérinaires, désinfectants, produits de protection divers) aux situations pour lesquelles il n’y a pas d’alternatives techniquement et économiquement utilisables doit demeurer au centre des politiques publiques.
De même, nous considérons que les distances de sécurité qui seraient définies doivent s’appliquer non seulement aux zones habitées mais aussi aux espaces naturels protégés (réserves naturelles, cœur de parc nationaux, …).
2. Nous retenons deux points essentiels dans l’avis de l’ANSES :
- L’Agence indique que l’évaluation des risques qu’elle réalise intègre l’ensemble des personnes concernées par ces épandages, qu’il s’agisse des personnes travaillant au sein des parcelles traitées, des riverains ou des personnes fréquentant des établissements publics situés à proximité ;
- qu’elle ne délivre pas d’autorisation de mise sur le marché si l’une quelconque de ces catégories de personnes est susceptible d’être exposée à un risque supérieur aux normes en vigueur.
Ces principes doivent être maintenus : il serait en effet éthiquement inacceptable que la décision publique conduise à ne pas assurer un niveau égal de protection à tous les citoyens.
3. Nous soulignons également que l’avis de l’ANSES reconnaît explicitement un certain nombre de difficultés et incertitudes dans ces méthodes d’évaluation des risques, notamment la prise en compte des effets cumulés, des synergies entre divers produits ou de l’évaluation de la dispersion.
Cela conduit l’ANSES à inviter les gestionnaires du risque à appliquer le principe de précaution et à considérer que les distances de sécurité de quelques mètres qu’elle propose sont des minimas. Il serait donc légitime que la décision publique ne se borne pas à ces distances minimales.
4. S’il apparaît légitime de prendre une marge de sécurité par rapport à ces distances minimales, il ne nous semble pas possible de fixer au niveau national une norme unique pour toutes les situations. Le dispositif proposé d’élaboration de chartes locales nous semble donc une démarche pertinente mais devrait être amélioré sur deux points :
- l’animation de la concertation entre toutes les parties prenantes doit être assurée par la puissance publique et non par les producteurs ou utilisateurs de ces produits ;
- la validation de ces chartes par le préfet doit s’appuyer sur une consultation des autorités locales compétentes dans le domaine de la santé (Agence régionale de santé) ET de la biodiversité (Agence régionale de la biodiversité), et de la Direction Régionale de l’environnement, de l’aménagement (Dreal).
(1) À l’exception des produits de protection « passive » ou répulsifs
(2) Par exemple, un herbicide qui éliminera la flore adventice réduira la ressource alimentaire pour des insectes ou des oiseaux et contribuera donc à la diminution de leurs populations.
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