COP15 : donnons-nous (vraiment) les moyens de préserver la biodiversité
Publié le 07/12/2022
La 15ème conférence des parties (COP15) de la Convention sur la Diversité Biologique (CDB), a commencé ! Ce rendez-vous international sur la biodiversité des États et acteurs non étatiques se tient à Montréal du 7 au 19 décembre. Il s’agit d’adopter un cadre mondial pour lutter contre l’érosion de la biodiversité pour la prochaine décennie (2020-2030).
Alors même que la COP27 Climat vient de se terminer en Égypte et que les synergies entre climat et biodiversité ne sont plus à prouver, les attentes des ONG de protection de l’environnement sont nombreuses pour que le futur cadre mondial pour la biodiversité soit ambitieux, efficace et partagé.
En ce jour de lancement des négociations, Humanité et Biodiversité propose un premier décryptage du mandat européen, adopté par le Conseil de l’Union Européenne en vue de cette COP15.
Si l’Union Européenne appelle dans ce mandat à l’amélioration des mécanismes de planification, de suivi et de contrôle du cadre mondial, nous pouvons regretter qu’elle n’identifie pas clairement, à l’échelle de son continent, les causes de l’échec du précédent cadre mondial : les objectifs d’Aichi (2010-2020). L’évaluation est une phase fondamentale pour comprendre pourquoi les objectifs n’ont pas été atteints et en tirer des leçons : est-ce l’absence d’indicateurs de suivi et d’évaluation ? de gouvernance claire ? de moyens suffisants et adaptés ? de cadre contraignant à l’échelle mondiale ? Les objectifs d’Aichi étaient-ils tous mesurables, acceptables, spécifiques, réalistes, temporellement définis ?
Protection et restauration de la biodiversité
L’Union Européenne appuie l’objectif déjà identifié de 30% d’aires protégées à terre et en mer à horizon 2030. Pour rappel, cet objectif est déjà atteint pour la France tant sur terre qu’en mer (données INPN). Pour autant, l’UE ne mentionne aucun objectif pour les espaces en protection stricte/forte alors même que l’efficacité écologique des aires terrestres ou marines protégées dépend au premier plan du niveau de protection.
La restauration des écosystèmes naturels est également un enjeu fort porté par l’Union Européenne : elle encourage à restaurer 3 milliards d’hectares d’écosystèmes terrestres dégradés (soit environ 2 fois la surface de la Russie) et 3 milliards d’hectares d’écosystèmes marins. Cette cible ambitieuse exprimée en surface peut surprendre, considérant que l’objectif discuté lors de la COP se négocie en % de surface d’écosystèmes dégradés, de même que le règlement européen pour la restauration de la nature - actuellement discuté par les différentes instances de l’UE - qui envisage d’engager des mesures de restauration sur au moins 20% des surfaces d’habitats naturels terrestres et marins du territoire Européen d’ici 2030.
De plus, l’Union Européenne se positionne favorablement au déploiement des solutions fondées sur la nature (SFN) qui concilient préservation de la biodiversité, adaptation au changement climatique et bien-être des populations. Cette approche peut notamment être suivie pour l’adaptation des territoires littoraux au recul du trait de côte.
La conservation des espèces sauvages menacées et la fin de l’exploitation non durable des espèces sauvages est une des cibles envisagées pour le cadre mondial et soutenue par l’Union Européenne. L’exemplarité des États membres - parmi lesquels la France - est primordiale. Or, les récurrents décrets d’autorisation des chasses traditionnelles non sélectives impactant des espèces d’oiseaux menacés et protégés à l’échelle européenne ne vont pas dans le bon sens.
Lors de la COP15, l’Union Européenne soutiendra également des thèmes qui ne sont pas envisagés dans ce nouveau cadre mondial mais que nous souhaitons saluer, notamment l’approche “une seule santé” que nous portons depuis de nombreuses années et la préservation de la biodiversité des sols.
Financement de la biodiversité
Par ailleurs, un fort enjeu des négociations portera sur l’apport de ressources financières, puisque le succès des politiques de biodiversité dépend notamment des moyens alloués et du fléchage des financements vers les projets adéquats. L’Union Européenne a récemment doublé sa contribution en s’engageant à affecter une enveloppe de 20 milliards d'euros par an via des fonds de l'UE et des financements nationaux et privés. Un engagement louable mais qui ne permet pas de combler le besoin de 598 à 824 milliards de dollars supplémentaires par an au niveau mondial.
Une première piste pour dégager des financements publics pour la biodiversité serait de mettre fin aux subventions néfastes pour l’environnement. Pour le budget français 2023 voté en ce moment par les parlementaires, le Réseau Action Climat (RAC) estime que ces dépenses publiques néfastes s’élèvent à 67 milliards d’euros. Il apparaît urgent de mettre fin à ces mesures coûteuses et néfastes. Humanité et Biodiversité soutient chaque année des propositions d’amendements au budget pour supprimer certaines mesures néfastes pour la biodiversité.
Mais ces objectifs de défense de la biodiversité ne doivent pas se faire au dépens des humains. Tout comme la lutte contre le réchauffement climatique, préserver la biodiversité doit s'effectuer dans le respect de l'humanité. Un point d'honneur que notre association - nommée à juste titre "Humanité et Biodiversité" - met au coeur de l'ensemble de ses actions et combats en faveur du Vivant.
Nous publierons un article bilan à l’issue des négociations. Restez attentifs !
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