Chasse paysanne contre chasse de loisir
Le chercheur en anthropologie Charles Stépanoff vient de publier aux éditions La découverte "L’animal et la mort - chasses, modernité et crise du sauvage". Un livre qui fait beaucoup parler de lui en abordant le sujet clivant de la chasse et qui présente de manière claire et documentée notre rapport actuel à la chasse et à la mort des animaux sauvages. Une lecture critique de son ouvrage est néanmoins indispensable. Sa vision de la chasse française est surprenante, encombrée de stéréotypes et de clichés. C’est dommage.
L’ouvrage se veut une étude sur l'évolution de la chasse et des chasseurs. Il présente la longue transformation de nos campagnes, de la ruralité de notre pays où la chasse était partie prenante de la vie de ses habitants à la fois pour son apport non négligeable en protéines mais aussi comme vecteur de lien social. Cette société rurale était à l'origine constituée d’agro écosystèmes qui offraient un milieu propice à nombre d'espèces quasi toutes chassées et mangées (lièvres, perdrix, lapins, grives, pigeons, vanneaux, courlis, renards...) sauf exception, comme les hirondelles. La chasse paysanne cohabitait avec une chasse réservée à des classes sociales plus aisées.
Cette chasse a quasiment disparu suite aux modifications de la démographie rurale, mais aussi du fait des nouvelles pratiques agricoles (pesticides, remembrements) ou cynégétiques (élevage industriel de gibier, lâchers, actions de chasse de plus en plus chères, domaines clos ..), et du fait de l’évolution des populations animales (moins de petit gibier sauvage et plus d'ongulés sauvages), pour donner naissance à une chasse moderne qui a créé ses propres codes voire ses nouveaux rituels, tout en conservant quelques anciennes pratiques traditionnelles.
L’auteur, en tant qu’anthropologue, a aussi questionné les "écolos », mais s’est limité aux seuls opposants à la chasse à courre (AVA), ce qui l’amène à quelques inexactitudes (comme lorsqu’il dit que les associations écolos ne s'intéressent qu'au bien-être animal et se désintéressent des pesticides et pratiques agricoles... Thème où les chasseurs seraient seuls).
Il est certain que cette réflexion engagée par Charles Stépanoff devra se poursuivre, notamment en approfondissant la réflexion sur l'ampleur du phénomène des néo ruraux et de leur insertion dans les territoires ainsi que sur le nouvel engouement pour la notion de sauvage. Les Français de plus en plus urbains ont forcément une approche de la nature différente de celles de leurs arrière-grands-parents paysans qui impacte leur vision et leur pratique de la chasse quand ils sont chasseurs. Leurs motivations feront-elles basculer l'opinion des anti-chasse ?
Un livre à lire pour toutes celles et ceux qui s’intéressent à l’évolution du lien Homme/Nature.
Voir aussi :
L'Écho n°120 "Déterrage du blaireau : stoppons le massacre !"
Les adhérents d'Humanité et Biodiversité viennent de recevoir L'Écho n°120, édition estivale de...
Effet des populations d’ongulés sur la biodiversité
Analyse et propositionsLa note présentée en pièce jointe concerne les problèmes de dégâts...
Gestion de la tuberculose bovine : le Blaireau a bon dos !
Saisie par Humanité et Biodiversité, France Nature Environnement, la LPO et l’ASPAS en septembre...
Notre position sur la chasse
Notre association pose cinq revendications essentielles pour encadrer les activités de chasse et...
Emmanuel Macron proscrit la chasse à la glu pour la saison 2020-2021
Contre l'avis de la Fédération nationale des chasseurs (FNC) et malgré les pressions politiques...
Tourterelle des bois : Emmanuel Macron accepte la demande des chasseurs
Au lendemain de l'annonce de la suspension de la chasse à la glu, le ministère de la Transition...