Position d'H&B - Trop de sangliers ?
Octobre 2018
Le cri d’alarme de la FNSEA
Le 30 août 2018, l’AFP (Agence France presse) relayait une déclaration de Madame Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, à propos des graves dégâts causés à l’agriculture par la surdensité de sangliers. "(Il y a) 700.000 sangliers abattus (par an), mais il y en a quatre millions. Je veux plus de chasseurs, moins de sangliers, moins de dégâts". (Le montant des indemnisations versées chaque année aux agriculteurs pour compenser les dégâts est estimé à 30 millions d'euros).
Elle s'inquiète aussi des risques de transmission dans les fermes de la peste porcine africaine, qui sévit déjà en Europe de l'Est, d'où certaines sociétés de chasse importent des sangliers pour leurs élevages de gibier.
Deux textes approuvés par le Conseil national de la chasse réforment les modalités de la chasse au sanglier. L'un allonge la période de chasse du 28 février au 31 mars. Ça peut paraître alléchant, en disant que les chasseurs vont chasser un mois de plus, ça va permettre de réduire les populations. "Sauf qu'aujourd’hui, ils chassent déjà neuf mois sur douze et on voit le résultat de leur régulation", a déclaré à l'AFP Thierry Chalmin, responsable du dossier dégâts de gibier à la FNSEA.
Un point de discorde d'autant plus grave qu'en compensation de ce mois supplémentaire, les chasseurs ont demandé la sortie du sanglier des espèces "nuisibles", ce qui entraîne de facto la suppression du droit pour les agriculteurs de tirer ou faire tirer des sangliers en mars, en cas de danger pour leur exploitation.
Un accroissement démographique
Le sanglier est un animal extrêmement adaptable. Il est omnivore et s’accommode de tout même s’il a des préférences. Si les ressources alimentaires sont suffisantes, il est sédentaire ; sinon il migre et ce, assez rapidement (une harde peut parcourir une vingtaine de kilomètre en une nuit).
Il fréquente tous les milieux, de la forêt aux abords urbanisés des villes, du littoral à la montagne, de la méditerranée aux régions aux climats continentaux. Une laie est mature sexuellement à partir de 5 mois, les mâles à dix mois. Le taux annuel moyen d’accroissement d’une population varie entre 80 à 200 %. Leur organisation sociale en harde menée par une vielle femelle expérimentée et l’intelligence de l’animal font qu’il acquiert vite de l’expérience, s’adapte, et protège au mieux sa progéniture, identifiant rapidement notamment les lieux de quiétudes (réserves, zones non accessibles aux hommes).
À part l’homme, le sanglier n’a que peu de prédateurs (les quelques 400 loups français en prélèvent bien quelques-uns, les 200 lynx et nos derniers ours aussi, à l’occasion, mais ces prélèvements sont limités géographiquement, faibles, et concernent des individus malades ou jeunes ne gênant donc pas l’accroissement des suidés).
En 1989 on tirait en France 100 000 sangliers par an. On en est actuellement à 700 000. Sa population est estimée à plus de 4 millions d’individus répartis sur tout le territoire français Ce phénomène d’accroissement touche toute l’Europe et certains autres pays États-Unis.
Problèmes posés par la surabondance de sangliers
La surabondance des sangliers crée des problèmes économiques (cf les dégâts agricoles cités parla Fnsea) mais aussi peut poser des problèmes sanitaires ( grippe porcine, , brucellose …), humains (accroissement des accidents routiers par collision) et aussi des problèmes écologiques. En effet, la surabondance des sangliers amène une prédation importante vis-à-vis de tout ce qui niche au sol (engoulevent ou certains rapaces comme les busards), réduit fortement la petite faune du sol (escargots). Les suidés en surnombre exercent une forte prédation sur ce qui leur est facile à attraper au sol ou dans des mares (lézards, salamandre, tritons, grenouilles). C’est une espèce « ingénieur », qui fouille le sol, le bouleverse et met à mal les densités de plantes bulbeuses, de champignons, perturbant la régénération des strates muscinales ou herbacés au point que, en surdensité, l’état de conservation de certains sites (réserves, zones Natura 2000) est dégradé. Si on possède une évaluation des dégâts agricoles du fait des procédures d’indemnisation, si sur les collisions routières l’Oncfs tient une statistique annuelle (moyenne annuelle de 40 000 collision dont plus de 15 000 causées rien que par les sangliers), en revanche pour les dégâts aux écosystèmes et aux autres espèces sauvages, on ne possède pas de données permettant une appréciation nationale à cette situation.
Position d’Humanité et Biodiversité
Le sanglier fait partie de notre faune. C’est une espèce qui a sa place dans nos écosystèmes. Il est devenu le gibier de base du chasseur français. Pour maximiser les occasions de tir et les tableaux, l’accroissement des populations a été encouragé.
Traditionnellement, on ne tire ni les marcassins en livrée, ni les laies suitées et ainsi le tir des seuls adulte mâle ne pèse pas de manière optimum sur la capacité d’accroissement des populations. De plus, l’agrainage systématique ainsi que les cultures à gibier (topinambour par exemple) dopent les populations, le sanglier adaptant ses effectifs aux capacités alimentaires disponibles.
Si actuellement il semble ne plus guère y avoir de lâchers de sangliers, cette pratique devrait être absolument proscrite. Mais certaines pratiques agricoles comme l’extension de la culture du maïs ont aussi accru grandement les populations de sangliers. Dans certaines zones à forts dégâts, il faudrait interdire l’agrainage et voir si les agriculteurs ne peuvent changer de culture au moins en attendant une baisse des populations de suidés.
Un travail national d’évaluation des impacts des effectifs de sangliers sur la biodiversité (population de certains animaux, plantes et champignons, état de conservation de réserves et autres zones de protection spéciales et zones spéciales de conservation) devrait être confié à l’AFB et au Muséum national d’histoire naturelle. Il faudra probablement aussi voir si des dispositifs d’effarouchement, voire des tirs plus systématiques, ne pourraient être effectués dans certaines réserves ou zones inaccessibles.
Cette situation n’est pas nouvelle et l’on a déjà sans grand succès essayé d’endiguer la croissance démographique des sangliers (circulaire Borloo du 31 juillet 2009, groupe de travail « agrainage » de 2010, mise en place de schémas départementaux de gestion cynégétique …).
On parle actuellement dans le cadre de la future loi chasse de gestion adaptive. Le sanglier, voici une bonne occasion pour mettre en place ce type de gestion !
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