Varenne agricole de l’eau, un coup d’épée dans l’eau
Mardi 1er février 2022, le Premier ministre Jean Castex a conclu le Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique aux côtés de Bérangère Abba, secrétaire d’État chargée de la Biodiversité, et de Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Ces travaux avaient étés impulsés par le Président de la République il y a plus de 8 mois et se sont organisés autour de trois groupes de travail thématiques. L’objectif était de construire une feuille de route opérationnelle pour répondre aux enjeux du monde agricole : adopter une gestion raisonnée de l’eau et s’adapter au changement climatique. Toutefois, ce Varenne est loin de faire consensus : France Nature Environnement, qui représente près de 6 000 associations dont Humanité et Biodiversité, avait décidé de ne pas participer à cette conclusion, y voyant une volonté de déposséder le ministère de la Transition écologique de sa compétence sur les questions liées à l'eau.
Les conclusions des trois groupes thématiques
Alors que le 1er groupe de travail devait traiter des questions de protection et d’adaptation de l’agriculture au changement climatique, la seule réponse concrète apportée est un projet de loi « assurance récolte » déjà passé à l’Assemblée nationale et en cours de vote au Sénat. Ce projet de loi présente une nouvelle architecture à trois étages du régime assurantiel pris en charge par l’agriculteur, par une assurance et par l’Etat selon les pourcentages de pertes.
Le 2ème groupe s’est concentré sur les questions liées à la résilience de l’agriculture dans une approche globale. Une boîte à outils a été créée, présentant des leviers d’adaptation à l’échelle de l’exploitation, à l’échelle de la parcelle et à l’échelle de l’animal. Une charte a également été signée par les parties prenantes (les ministres, les chambres d’agriculture, l’INRAE...) mais n’a par définition aucune valeur contraignante, ce qui signifie que la mise en œuvre de ces engagements dépendra de la bonne volonté des signataires.
Ce n’est qu’en présentant les résultats du 3ème groupe de travail que l’on se réfère enfin aux Assises de l'eau de 2018/2019, sans pour autant avoir considéré l’avis du Comité national de l’eau sur le Varenne publié en décembre dernier. Les projets territoriaux de gestion de l’eau (PTGE) sont reconnus comme étant le bon outil à l’échelle des territoires mais il faut en accélérer leur application, notamment via l’écriture d’un guide pratique national et la mise en place d’un site plateforme centre de ressources.
La position d'Humanité et Biodiversité
Si un délégué interministériel sera nommé dans les prochaines semaines et aura la charge du suivi des travaux engagés dans le cadre du Varenne, nous pouvons nous questionner sur l’efficacité d’un tel pilotage. Humanité et Biodiversité considère que le délégué doit être rattaché au Premier ministre et avoir la responsabilité de veiller à la coordination des actions, tant au niveau « horizontal » (entre les ministères, services et établissements publics de l’État) que « vertical » (entre le niveau national et les collectivités territoriales et acteurs des territoires). Pour inscrire dans la durée ce Varenne, le rattachement au Premier ministre pourrait se faire via l’un de ses services en charge de la planification à long terme des actions, comme le SGPI (Secrétariat Général Pour l’Investissement).
Jean Castex a également annoncé la mobilisation de deux enveloppes de France 2030, d’un montant de 100 millions d'euros chacune, pour répondre aux enjeux de modernisation et d’adaptation de l’agriculture au changement climatique. Toutefois, les appels à projet sont un format qui limitent la portée de ces financements : chaque entité n’ayant pas les mêmes moyens humains, financiers et techniques de monter ce type de dossier administratif.
De plus, sur le plan financier, on peut s’étonner que ce Varenne n’ait que trop peu abordé la question de la mobilisation des crédits de la PAC, alors même que le PSN déclinant cette politique en France a été soumis fin décembre à la Commission européenne.
Plus globalement, la multiplication d’évènements et de rapports sur les mêmes sujets, témoigne d’une volonté de chacun d’ajouter sa pierre à l’édifice. Or, les travaux préexistants apportent déjà des réponses - à l’instar du rapport CGEDD/CGAAER de 2020 « Changement climatique, eau, agriculture : quelles trajectoires d’ici 2050 ? » - qu’il conviendrait d’utiliser pour économiser un temps considérable.
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